La musique des Transmissions, à Rennes, a un nouveau chef en la personne de Sandra Ansanay-Alex. Petit événement pour la grande muette : il s'agit de la première femme à accéder à un tel poste dans l'armée française.
Elle n'est là que depuis quelques jours. Mais dans son grand bureau du quartier militaire Lyautey, à Rennes, Sandra Ansanay-Alex est déjà comme un poisson dans l'eau. La pression d'être la première femme chef de musique dans l'armée française semble glisser sur elle. Du haut de ses presque 45 ans, celle qui vous raconte son histoire d'un air espiègle donne l'impression d'avoir vécu plusieurs vies. Un sourire quasi permanent illumine un visage très fin. Il révèle sans doute le caractère d'une femme bien décidée à profiter de tous les instants.
Concours et médailles
Originaire de Haute-Savoie, Sandra Ansanay-Alex n'avait pas de prédisposition pour la musique. Père mécano, belle-mère faisant des ménages, « je ne viens pas d'un milieu culturel », confie celle qui occupe désormais le grade de chef de musique de 1r e classe aux Transmissions, l'équivalent de capitaine. Elle mettra un pied à l'école de musique enfant. Elle ne la quittera plus. Et enchaînera les conservatoires, comme les prix et les médailles : Annecy, Lyon, Paris, Genève... tout en obtenant un DUT en organisation et gestion de production. Son instrument de prédilection est le hautbois mais elle joue aussi du basson et de la contrebasse à corde. L'armée n'était pas forcément inscrite dans ses gènes. Mais à la fin des années 90, elle rentre dans l'infanterie en tant que volontaire militaire féminin. « Cela me donnait un métier et me permettait de continuer à payer mes études », explique celle qui intègre l'orchestre du 22e BI (bataillon d'infanterie).
160 sauts en parachute
C'est en 2006 qu'elle se décide à passer le concours de chef de musique dans l'armée. « Quand on commence à jouer d'un instrument, on ne se dit pas que l'on veut plus tard diriger un orchestre. J'ai été poussée par mon chef pour passer le concours ». Elle a déjà été formée par de grands maîtres, comme Roger Boutry, son mentor. « L'un des rares hommes à avoir composé des musiques savantes pour orchestre d'harmonie ». Sa première affectation en tant qu'adjointe : la musique des parachutistes, à Toulouse. Les fameux bérets rouges. Rien n'oblige alors Sandra Ansanay-Alex à sauter en parachute. Mais elle sait que pour se faire respecter, il faut montrer l'exemple. Elle a donc sauté à six reprises pour obtenir son brevet. « Le premier saut, j'ai eu peur », concède-t-elle sans se départir de son sourire. Aujourd'hui, la chef de musique en compte 160 à son actif ! Après un passage à la musique des troupes de Marine à Satory (Yvelines), la voilà donc en charge du commandement de la musique des Transmissions, qu'on appelle aussi « Musique de Rennes ». 54 militaires, dont douze femmes, et une civile sont sous ses ordres. Leur mission : assurer les passations de commandements, les cérémonies, les protocoles pour la zone de Défense Ouest. Mais aussi proposer des concerts ou des parades, et pas seulement de musique militaire. Grande particularité de la musique des Transmissions, elle compte deux cornemuses et deux bombardes. « Cela donne une touche de bagad mais on est très loin de rivaliser. Nous ne sommes pas un orchestre d'instruments celtiques », prévient-elle.
Kawa et tango mais pas de cuisine
Être la première femme à accéder à ce poste prouve, selon elle, qu'il n'y a pas de plafond de verre. « Après, j'ai été confrontée, comme les autres, à la misogynie, au machisme. On doit plus faire nos preuves. Mais l'armée offre plus de possibilités que dans le civil ». Désormais en Bretagne, elle souhaite mettre à profit son expérience pour rapprocher les Transmissions des professeurs de musique de collège. « Pour que les enfants chantent et qu'on les accompagne ». Sandra Ansanay-Alex, dont le compositeur fétiche est Gustave Malher, veut aussi créer plus de liens avec les étudiants du conservatoire régional de Rennes. Et si son temps personnel le permet, elle continuera à enfourcher sa Kawasaki Z pour aller faire de l'équitation ou du tango argentin. Mais pas de cuisine. « Car je ne sais même pas cuire un oeuf », rit celle qui manie pourtant la baguette avec dextérité.
Source Le Télégramme
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